« Première séance » est le deuxième court-métrage de Louido de Lencquesaing, acteur, réalisateur, metteur en scène au théâtre.

Certains membres de l’Association Lacanienne Internationale s’en souviennent peut-être, nous avions présenté avec lui ce film  à Rome, lors de journées sur « le Couple »,  il y a quelques années de cela.

Première séance raconte une première séance d’analyse. L’art de l’ellipse est là, qui consistait, de cette première séance, à n’en filmer qu’une porte, réelle, celle derrière laquelle avait vécu Marguerite Duras, une porte de la rue Saint Benoît, à Paris, et de n’en filmer de cette séance, que l’avant, un trajet en train, et un après, une rencontre entre l’analysant et un ami de toujours, incarné à l’écran par Claude Duneton.

La psychanalyse,  le couple analysant-analyste  a de toujours, fait rire au cinéma.

Dans Première Séance, Louido de Lencquesaing filmait avec finesse, ce qui pour nous, n’entre pas dans le champ de la représentation. Cette séance était un trou dans le film,  une scansion, un arrêt dans l’image.

Dans son deuxième court métrage, « Même pas en rêve », c’est d’un autre couple dont il était  question : un père et sa fille. Il y a dans le film, le souvenir-écran d’une séance partagée au cinéma entre lui et elle, petite. Regardant les 101 dalmatiens, ils se fondent dans l’image.

Dans « Au galop », son premier long métrage, c’est encore du couple,  dont il est question. Mais là où Antonioni dans nombre de ses films, comme le  Désert rouge, constatait le non rapport du sexuel, le gap, là où il filmait chaque fois dans l’errance de Monica Vitti le ratage du rapport entre homme et femme, Louido de Lencquesaing lui, en filme la tentative, celle du Un, mythique.

On suit Paul, tour à tour, fils, père, frère, amant. On suit Alice, tour à tour, sa fille, petite fille, jeune femme. On suit la grand-mère, jouée par Marthe Keller, perdant pied,  au décès de son mari. De cette circulation des places, de ces rapports d’un autre à l’autre,  nul message à délivrer, nul dysfonctionnement, nulle crise sinon existentielle,  mais des chutes, pour chacun, pour relancer le désir.

Le film laisse sur une sensation étrange. Il oscille entre le cinéma de Truffaut, et celui de Sautet : L’amour, la famille, l’amitié. Oui mais… C’est comme si ce que ces deux cinéastes en auraient normalement filmé, était là retiré du montage, ou filmé en creux, simplement esquissé. Le personnage de la femme désirée, joué par Valentina Cervi, est une femme apaisée, lisse, presque transparente. Le couple vacillant est filmé frontalement, et à distance du sujet. Et c’est peut-être ce qui donne au film,  l’allure d’un constat nostalgique, non pas sur le fait qu’une vie de famille, filmée dans une bourgeoisie parisienne, serait de l’histoire ancienne,  mais que sa représentation au cinéma,  n’aurait d’urgence à être, qu’à n’en déployer aujourd’hui que les dysfonctionnements,  ou les nouvelles configurations à venir. Après le couple impossible filmé par Antonioni,  De Lencquesaing s’arrête sur un, sur des couples, apaisés, maîtrisés,   savants. Ce qui  marque un regard à distance des préoccupations contemporaines .